Lenzerheide, Switzerland

cairn dans un paysage minéral sur le totälpli au dessus de lenzerheide

Depuis qu'il m'est donné d'en rencontrer en chemin, j'ai toujours pu constater en moi l’émergence d’une considération contrariée à la vue des cairns — ces empilements de pierres érigés par mes congénères —, voire même d’une franche aversion. Pratique attestée depuis des temps immémoriaux afin de baliser le passage d’un col en terrain difficile, de marquer la présence d’un abri, de situer un site funéraire ou cultuel, sa raison d’être a progressivement perdu de son sens et en charme. Alors que l’alpiniste et le randonneur actuels font le suivi topographique et météorologique de leur itinéraire en temps réel après les avoir étudiés à l’avance, l’utilité et le symbole du cairn ont perdu de leur vigueur. Aujourd’hui, ce dernier se borne à signifier un passage: non pas celui à emprunter, mais le seul fait déclamatoire de celui qui aura déposé sa petite pierre à l’édifice; sans doute animé par l’idée candide et grandiloquente d’une humanité rassemblée par un même geste. D’un marqueur paysager utilitaire, le cairn contemporain ne s’exprime plus que comme l’acte symbolique d’une présence individuelle fière de son effort et de son existence partagée au sein du décor. De ce fait, je n’avais jamais octroyé d’égard que néfaste à cette entreprise, et n’avais jamais ressenti l’envie d’en photographier. Jusqu’à avant-hier.

Quand l’effort s’octroie tant les capacités physiques que cérébrales du corps, il devient très difficile d’opérer un regard tout à fait investi sur les alentours, si bien que l’appareil photographique demeure en pendentif, frappant la cadence sur la poitrine. En redescendant du sommet du Parpaner Rothorn que j’avais rejoint depuis la Hörnlihütte sur les hauts d’Arosa, j’ai remarqué un édicule rocheux auquel je n’avais pas prêté attention à l’ascension. Sur fond de toile minéral et désertique, de par sa forme quadrangulaire, il avait de quoi surprendre et évoquer quelque objet familier à l’humain traversant ce lieu, dont le toponyme est évocateur: “Totälpli”, soit l’alpe de la mort. Autrefois incorporée à un pan de montagne effondré depuis bien longtemps déjà, cette concrétion se distinguait par sa stature, qui bien qu’en pleine érosion, n’était pas sans rappeler celle d’une cabane en pierre sèche, d’une maison primitive, ou d’un abri troglodyte: une faille centrale mimant la présence d’une entrée au fronton de laquelle on aurait peint les armes d’une mystérieuse guilde montagnarde, un toit fait de pierres amoncelées, le tout serti d’un pourtour de gazon verdoyant.

Naturellement présent, notre bloc erratique aux allures géométriques artificielles a immanquablement attiré l’attention des passants qui l’ont surélevé d’un cairn triangulaire. Il est également le point d’ancrage d’un marqueur contemporain peint blanc-rouge-blanc des chemins de randonnée de montagne. J’aime penser que certains des fragments qui le surélèvent proviennent de ses flancs effrités, et qu’ils lui auraient ainsi été restitués. J’avais toutes les raisons, cette fois-ci, de faire acte photographique, puisque tous les attributs d’un cairn effectif et complexe étaient rassemblés. Malheur à celui qui désire ardemment faire état d’une conjonction existentielle extraordinaire par une image et qui ne dispose pas de lumière… Heureusement, après quelques essais déçus et avant de reprendre mon chemin, une rare éclaircie s’est faite sur la terre et en mon ciel.

Issu du projet “De la représentation des Alpes en Suisse” soutenu par la bourse de mobilité du Service de la culture du Canton de Fribourg

Immersion parmi les moines

Le Regard Libre, revue suisse de débat dont je salue la démarche intellectuelle, consacre un numéro à la permanence du sacré en ce début de XXIe siècle. Ma récente enquête photographique Hors du monde, pour le monde — réalisée à la demande du Musée d’Art et d’Histoire de Fribourg — fait la couverture et figure au menu du dossier. On y lit notamment un passionnant entretien de Jonas Follonier avec Olivier Moos au sujet des racines religieuses de la culture de l’éveil et du socialisme culturel, ainsi que de nombreuses autres valeureuses contributions.

Le Regard Libre est en vente dans toutes les librairies Payot et peut se commander en version numérique ou imprimée sur la boutique en ligne : https://leregardlibre.com/points-de-vente/

Swiss Press Photo Award 2024

FR — Ma série de portraits de la pianiste Yuja Wang, publiée par Le Temps, a été récompensée par le 3ème prix du Swiss Press Photo Award 2024 dans la catégorie Portraits. Je suis honoré de cette distinction qui soutient et encourage ma démarche.
Je remercie le Verbier Festival de m’avoir permis la réalisation de cette série, ainsi que pour la confiance témoignée au long de quinze ans de collaboration.

EN — My portrait series of pianist Yuja Wang, published by Le Temps, was awarded with 3rd prize of the Swiss Press Photo Award 2024 in the Portraits category. I am honored by this distinction, which supports and encourages my work.
I'd like to thank the Verbier Festival for allowing me to produce this series, and for the trust shown in me over fifteen years of collaboration.

Capture d'écran du site du Swiss Press Photo Award

Capture d'écran du travail primé par le Swiss Press Photo Award

Capture d’écran du site du site de la Bibliothèque Nationale Suisse

Double page parue dans Le Temps du 15.07.2023

Écran publicitaire faisant la promotion de l’exposition Swiss Press Award 2024 à la Bibliothèque Nationale Suisse — © Anthony Anex / Keystone ATS

La pianiste chinoise Yuja Wang se produit au Festival de Verbier en juillet 2023. Des portraits exceptionnels de l’artiste de renommée mondiale sont réalisés dans les Alpes valaisannes. Par exemple, celui où elle s’étire longuement sur scène pendant une répétition. Belles à porter : Yuja Wang est aussi connue pour ses tenues extravagantes.

Source : Swiss Press Photo Award — Photo : © Nicolas Brodard

Série de stories publiée par le Verbier Festival

Série formatée en Story, publiée par le Verbier Festival à l’occasion de son 25ème anniversaire. Photos : © Nicolas Brodard

Alpes : Bourse de mobilité & collaborations

FR — Le service de la culture du Canton de Fribourg m’a octroyé une bourse de mobilité pour la production de mon projet De la représentation des Alpes en Suisse, qui me permettra de parcourir l’arc alpin des régioins alémaniques et italophones tout au long de l’année 2024. En parallèle, ma démarche s’enrichit d’une collaboration avec l’équipe d’historiens du Prof. Claude Hauser de l’Université de Fribourg dans le cadre de leur projet de recherche FNS intitulé “La mondialisation des Alpes, du paysage à l’environnement”.

EN — The culture department of the Canton of Fribourg has allocated me a mobility grant for the production of my project Of the representation of the Swiss Alps, which will enable me to tour the Alpine arc of the german and italian speaking regions throughout 2024. At the same time, my approach is enriched by a collaboration with Prof. Claude Hauser's team of historians at the University of Fribourg, as part of their SNSF research project entitled "La mondialisation des Alpes, du paysage à l'environnement".

capture d'écran de l'article de la liberté

“Deux artistes fribourgeois distingués par l’État”, in La Liberté, 19.01.24

capture d'écran du site de l'état de fribourg

“L’Etat de Fribourg attribue deux bourses de mobilité pour la création artistique” in fr.ch, 19.01.24

Verbier Festival Stories

 

FR — À l’occasion du 30ème anniversaire du Verbier Festival, j’ai le plaisir de publier un projet personnel réalisé au cours des dernières éditions. Il comprend plusieurs séries de portraits d’artistes réalisés pour une diffusion numérique en format story, ainsi que d’une exposition photographique déployée sur l’esplanade des Combins à Verbier :

Pour fêter son 30° anniversaire, le Verbier Festival dévoile une série de photographies inédites réalisée par Nicolas Brodard. Au plus près des artistes, le photographe entretient une relation de confiance depuis des années avec les virtuoses du Verbier Festival. De la scène aux coulisses, il capture, plus que l'histoire du festival, l'intensité, la joie, la préparation, le calme et l'excellence.

Ses images entraînent le public dans les profondeurs de la création, elles invitent à contempler l'aura des musiciens, leur personnalité, leur singularité, et témoignent avec justesse de leur virtuosité.

EN — To mark the 30th anniversary of the Verbier Festival, I'm pleased to release a personal project I've been working on over the last editions of the Festival. It consists of several series of portraits of artists produced for digital publication in story format, as well as a photographic exhibition on the Combins esplanade in Verbier :

To celebrate its 30th anniversary, the Verbier Festival is unveiling a series of previously unseen photographs by Nicolas Brodard. As close to the artists as possible, the photographer has maintained a relationship of trust with the virtuosos of the Verbier Festival for many years. From the stage to backstage, he captures, more than the history of the Festival, the intensity, the joy, the preparation, the calm and the excellence.

His images take the public into the depths of creation, inviting us to contemplate the aura of the musicians, their personality, their singularity, and aptly testifying to their virtuosity.

 

#1 — YUJA WANG

#2 — EVGENY KISSIN

#3 — JANINE JANSEN

#4 — GAUTIER CAPUÇON

#5 — MAO FUJITA

#6 — ANDRÁS SCHIFF

BONUS — 30TH EDITION UNOFFICIAL DIRECTOR’S CUT

 

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Page du portfolio paru dans Le Temps

Portfolio about Yuja Wang in Le Temps (click to visite wepage)

Screenshot of medici.tv website

Stories section on Medici.tv (click to visit webpage)

Capture d'écran du site de l'émission de Radio Classique

Interview sur Radio Classique (cliquer pour écouter l’émission)

Interview on Medici.tv ( click to watch / from 1:13:40’’)

Istanbul allers-retours

À l’occasion du centenaire de la république turque, j’ai le plaisir de publier, avec mon collègue Clément Girardot, un récit croisé sur notre relation de longue date avec Istanbul. À cette occasion, nous avons tous deux écrit nos mémoires, et les avons illustrées par des images réalisées par l'un et par l'autre.

Ce récit en long format est à retrouver dans le journal La Couleur des Jours, disponible dès le 5 juin 2023 dans les kiosques où via le site internet de la publication.

La République de Turquie, qui célèbre son centenaire en octobre, a traversé une décennie marquée par une forte dégradation démocratique, par la violence de la répression et par un retranchement nationaliste et conservateur.
Les élections des 14 et 28 mai 2023 n’ont pas stoppé cet enchaînement.

Peuplée comme deux fois la Suisse et s’étendant sur plus de 100 kilomètres d’ouest en est, la mégapole d’Istanbul est un objet de recherche et d’exploration inépuisable. Clément Girardot et Nicolas Brodard y résident sur de longues périodes entre 2007 et 2013, puis plus sporadiquement. Ils y débutent leur carrière, respectivement dans le journalisme et la photographie, et se rencontrent pour la première fois en février 2011 au café de l’Institut français.
Au moment où ils débarquaient à Istanbul, l’atmosphère était résolument optimiste et la scène culturelle stambouliote rayonnait.

Leurs récits croisés, entre souvenirs professionnels et considérations personnelles, parlent d’exaltation et de mélancolie, de passion et de désillusion, de solitude et de fraternité.

Istanbul Hors Limites

Kayasehir, dans la banlieue d'Istanbul

21.10.2021 — © Nicolas Brodard

La revue suisse d’architecture et de culture du bâti Tracés publie un dossier sur l'expansion urbaine démesurée d'Istanbul durant les décennies Erdogan en cette année 2023, qui marque le centenaire de la république de Turquie.
Avec mon ami et collègue Clément Girardot, j’ai contribué au pilotage de ce dossier spécial disponible en ligne sur le site de la revue. Mon portfolio intitulé Metaverse Megapolis est visible dans la section éditoriale de ce site.

À tous les contributeurs, ainsi qu’à Sinan Logie et à Elif Akbiyik, nous exprimons nos chaleureux remerciements, ainsi qu’à Marc Frochaux et à son équipe pour leur confiance et leur travail.

  • Istanbul hors limite de Clément Girardot

  • De l’Empire à Erdoğan, la conception turque de l’aménagement du territoire de Jean-François Pérouse

  • Canal Istanbul: le mégaprojet de trop? de Clément Girardot (texte) et Nicolas Brodard (photographies)

  • Gülsuyu Solidarity: une expérience participative de planification et de design de Emrah Altınok

  • Metaverse Megapolis de Nicolas Brodard (portfolio photographique)

EXPOSITION — AUSSTELLUNG — EXHIBITION

FR — Durant une année, à la demande du Musée d'Art et d'Histoire de Fribourg, j'ai eu la chance de côtoyer et d'intégrer plusieurs communautés monastiques fribourgeoises. Je restitue cette expérience dans une exposition composée en écho au mode de vie et à la raison d'être du monachisme, où l'on redécouvre notamment le contour des thèmes métaphysiques universels.

DE — Auf Anfrage der MAHF hatte ich ein Jahr lang die Möglichkeit, verschiedene klösterliche Gemeinschaften in Freiburg zu integrieren. Ich habe diese Erfahrung in einer Ausstellung wiedergegeben, die die Lebensweise und den Sinn des Mönchtums wiedergibt, wo wir die Grundzüge der universellen metaphysischen Themen wiederentdecken.

EN — For a year, on request of the MAHF, I had the chance to integrate several monastic communities in Fribourg. I have restituted this experience in an exhibition that echoes the way of life and the purpose of monasticism, where we rediscover the outline of universal metaphysical themes.

Informations et évènments : https://www.fr.ch/mahf/evenements/museoscope-nicolas-brodard